dimanche 26 novembre 2017

Le bouton de la douleur

J'ai rencontré une infirmière qui m'a hypnotisé.
J'étais volontaire, et cette personne de l'équipe anti-douleur de l'hôpital s'était donnée comme mission de me faire du bien.
Depuis l'apparition de cette maladie,sans doute influencé par innombrables clichés de mon squelette, j'ai souvent ces mots à la bouche : "J'ai des trous dans les os". Il y a la réalité et il y a la représentation que je me fais de cette réalité.

Installé dans mon fauteuil j'écoute la voix de Nathalie mon infirmière hypnotique, c'est une voix tranquille et posée qui porte assurance et bienveillance. La voix me guide, m'invite à prendre d'abord conscience de ce qui m'entoure, puis de ma respiration, puis de mon corps. J'ai les yeux fermés je suis bien.
Nathalie me demande de prêter attention au trou dans les côtes celui qui est à gauche tout près du cœur, à cet endroit où la douleur est quasi permanente depuis 18 mois.
‎Puis la voix de Nathalie m'informe que j'ai un bouton dans ma main, comme ceux qui sont sur les anciens postes de radios. Il me suffit de tourner doucement le bouton pour que le trou se referme et que la douleur disparaisse.
‎j'ai pris le bouton entre mes doigts et lentement je l'ai tourné. Alors j'ai vu, ou plutôt ressenti le trou progressivement se fermer, comme le fait le diaphragme d'un objectif de vieil appareil photo.
‎En même temps j'ai pris conscience que la douleur diminuait de la même façon que la lumière est arrêté par le diaphragme qui se ferme. Tout cela je l'ai intensément vécu. Nathalie par sa voix était toujours lié à moi. Elle s'est mise à compter 10 9 8... À 3 j'ai ouvert les yeux. Le décompte terminé. J'étais de nouveau sur mon fauteuil. Lucide, avec un sentiment de bien être et la douleur coté cœur disparue.

dimanche 12 novembre 2017

Histoire où j'apprends à me taire

Dans la salle d'attente d'hématologie, il y a trois personnes assises, une femme âgée entourée par deux femmes plus jeunes. Dans ce trio je devine deux sœurs et leur mère. Elles m'ont entendu parler du myélome, Les plus jeunes me font signe pour que je vienne discuter avec elles. Elles me confirment quelles sont bien sœurs et qu'elles accompagnent leur maman en consultation. Elles me racontent leur histoire. La maman vient de finir un troisième traitement et les résultats ne sont pas bons, les jeunes femmes me disent leur peur.
‎les deux sœurs prennent tour à tour la parole, la vieille dame me regarde à peine esquissant toujours un sourire de gentillesse. Elle reste silencieuse ne répondant pas aux sollicitations de ses filles.
Celles-ci me posent des questions sur les nouveaux traitements sur les causes de la maladie, sur la recherche; et moi je m'applique à répondre à toutes ces interrogations .
Après quelques minutes d'échanges la vieille dame, toujours avec le sourire, lève la tête, me regarde et dit doucement: "Dès fois on n'a pas envie de savoir" .

Une de ses deux filles qui n'a pas entendu lui demande "Qu'est ce que tu dis maman" Je répète les mots de la vieille personne et je lui dis : "je crois que vous voulez que je me taise, que je m'en aille." Elle a simplement continué de sourire.
Sur deux dépliants j'ai noté mon numéro de téléphone, je les ai donnés aux deux filles en les invitant à m'appeler, j'ai dit au revoir à toutes les trois et je suis parti silencieux m'installer quelques sièges plus loin.

dimanche 5 novembre 2017

Le vieil homme et son médecin

Dans la salle d'attente d'hématologie un vieux monsieur est assis, deux sacs devant lui, replié sur lui même il regarde ses pieds. Après avoir hésité je m' approche de lui et j'entame la conversation. Très vite le vieil homme se redresse, me regarde, me sourit et me raconte son histoire.
J'étais sportif avant , puis je me suis mis à maigrir à avoir mal aux os. Mon médecin m'a dit que ce n'était pas normal qu'il fallait faire des analyses. Deux jours plus tard le matin, mon docteur m'appelle pour m'avertir qu'il a des résultats partiels et qu'ils ne sont pas bons. Il me tient au courant des qu'il a la fin des analyses.
L'après midi on sonne à ma porte c'est mon médecin. Il me dit "c'est grave ce que vous avez c'est lié au sang. Oui c'est peut-être un cancer. Il faut que vous alliez aux urgences." Je n'ai pas préparé d'affaires car je ne pensais pas rester longtemps. Je dis à mon docteur qu'il fallait téléphoner à l'ambulance . Il m'a répondu: "Non ma voiture est là, c'est moi qui vous emmène".
Il m'a conduit aux urgences de l'hôpital. Une fois arrivé il s'est assuré qu'on allait bien s'occuper de moi puis il est parti.
Le soir, il était 22 h j'étais dans la chambre d'un service. On frappe à ma porte, c'est mon médecin. " Je viens voir si vous êtes bien installé, vous n'êtes pas à l'hôtel, mais on s'occupe bien de vous ici. J'ai téléphoné à un collègue au CHU, vous allez avoir prochainement un rendez-vous avec un hématologue". Puis il est reparti chez lui.

Le vieux monsieur a conclu son récit .
On me dit que c'est rare un médecin comme le mien. Vous pouvez raconter ce que je vous ai dit.

L'hématologue est apparu à l'entrée de la salle d'attente.
Le monsieur a pris ses sacs m'a dit avec le sourire un bel revoir et d'un pas tranquille s'en est allé.