jeudi 18 février 2016

Dimanche 25 octobre: J'ai vu

J'ai vu une femme faire le ménage en riant. J'ai vu cette femme m'offrir un café : "Vous voulez un café chef" J'ai vu cette femme d'origine immigrée aller boire son café auprès d'une vieille dame au foulard sur la tête. J'ai vu le plaisir du partage.  J'ai vu cette femme partir le soir après sa journée de travail et avec un grand sourire me dire : "A mardi chef, demain c'est ma journée de congés."

Dimanche 25 octobre: Qui est qui ?

Il n'est pas facile de se repérer dans ce monde blanc à dominante féminine. Pour un non daltonien il doit être possible de différencier les professions par des petites touches de couleurs sur le blanc. Moi je ne peux pas. Parfois il y a le nom sur les blouses. Mais cela ne marche pas quand c'est écrit " lingerie CHU "
Il y a le professeur. Il se reconnaît parce qu'il est un homme et qu'on ne le voit pas souvent. Le jour de la grande visite c'est lui que tout le monde suit. Il est aussi capable, une fois la blouse enlevée, avant de partir de venir de saluer pour te motiver à rester.
L’interne ou la jeune femme médecin se reconnait au stéthoscope qui sort de la poche de la blouse. Elle vient te voir chaque matin à la même heure. Elle est capable de te dire avec le sourire que l'examen que tu attends depuis 7 jours tu aurais dû le faire hier mais que tu le feras demain.
L'infirmière a une montre accrochée à sa blouse. Dans ses poches, un stylo, des ciseaux ronds parfois un garrot. Avant d'entrer elle stationne son charriot de soins devant la chambre. L'infirmière, c'est elle qui te prend une tension une température. Elle te pique te "torture" et veille pour autant à ce que tu n'es pas mal
L'aide-soignante. Quand tu appuis sur la sonnette c'est elle qui arrive en premier.  Elle est sur tous les fronts. Sauf exception elle est toujours de bonne humeur pour t'aider à la toilette ou faire ton lit ou t'apporter ses succulents plateaux repas.
Le brancardier est facile à repérer. C'est un homme. Il a toujours son téléphone à la main prêt à recevoir ses ordres de convoyage. Sinon en période creuse le jeune brancardier drague les jeunes stagiaires. Le brancardier est bien chaussé car il marche beaucoup.
L’ASH. Derrière ce vilain nom il y a eu femme qui avec son chariot de ménage fait en sorte que tout brille. Elle est à l'affut du mot et du geste qui lui affirmeront son statut d'humain sensible.
Le stagiaire est là pour apprendre et il rend bien service. Il s'applique à mettre en œuvre ce qu'il a vu en cours, et cela se voit. Les stagiaires sont nombreux et sont toujours prêts à agir.

La cadre de santé c'est la seule en blouse blanche qui ne s'occupe pas des malades. D'ailleurs elle ne leur parle pratiquement jamais.  Par contre elle parcourt souvent à grand pas les couloirs du service.

Samedi 24 octobre En civil

Ce matin j’ai pris une grande décision. Je mets un pantalon. Et me voilà déguisé en monsieur tout le monde.

Samedi 24 octobre Rencontre

Hier j'ai rencontré une femme médecin qui m'a posé des questions. Elle m'a demandé ce que je faisais comme métier, à quel endroit. Elle a voulu savoir si j'avais des enfants, où je vivais. Elle s'est intéressée à mes réponses en y apportant des commentaires.  Une conversation ordinaire, humaine. Cette femme a pris l'initiative incroyable de ne pas s'adresser seulement à la partie  malade du bonhomme  mais au Laurent tout entier. (1m92 105 kilos)

Samedi 24 octobre: Lever de soleil au 17 ème


Vendredi 23 octobre Photos chocs

J'ai décidé de ne pas mettre de photos pouvant choquer les âmes sensibles. Aussi je ne mettrai pas sur mon blog de photos de mes plateaux repas.

Vendredi 23 octobre Signe d'amour

Il suffit d'un signe d'amour
Pour que les larmes
Se jouent des angoisses
Et Soient signes de force et d'espoir
Alors laisser couler

Ce fleuve de tendresse.

dimanche 14 février 2016

Jeudi 22 octobre Descente en IRM

 Après une semaine d'attente je vais enfin passer l'examen. Accompagné d'un brancardier, il faut d'abord rejoindre les entrailles du vieux CHU puis parcourir des couloirs, prendre un ascenseur pour s'enfoncer un plus. Le chemin met en condition. Ça y est je suis au pied de la machine. Je m’allonge sur le support. L'assistante m’équipe de bouchons antibruit avec par-dessus un autre dispositif pour me rendre un peu plus sourd. Et c'est vrai qu'il vaut mieux être sourd. Je rentre tête la première dans le tunnel. Telle une plongée à 40m de fond sans visibilité avec le bruit d'un Airbus dans chaque oreille je suis parti pour 45 minutes de voyage. Contrôle de la respiration, je profite de mes paysages intérieurs ...Les bruits s’arrêtent, je ressors du monstre sonore et tranquillement je me lève.
Je pense vraiment que certains inventeurs sont sourds...

Jeudi 22 octobre Le brancardier

Ce matin. Le brancardier de l'étage est tout émoustillé. Comme il n'y a personne à brancardier, le jeune homme accompagne le personnel soignant dans les chambres.

"Mais tu as quel âge. Tu fais quoi le soir ..." Grâce à notre statut de patient qui nous rend invisible nous assistons au spectacle. Notre jeune brancardier avec un sourire béat s'approchant de la niaiserie, drague les stagiaires.

Mardi 20 Octobre La table de nuit

Dans une chambre d'hôpital il est un endroit où ta vie privée est respectée. La table de nuit.  Son intérieur semble un espace en dehors de l'hôpital. Ma table de nuit c'est d'abord un garde-manger. Les repas tant en qualité qu'en quantité ne peuvent satisfaire mes besoins nutritionnels. Alors de nobles messagers m'ont apporté nourriture répondant à mes attentes gustatives et caloriques. Ce soir ma table de nuit a même un compartiment réfrigéré. Actuellement nous avons en magasin : Du chocolat, des gâteaux secs de la compote maison, du yaourt de soja, et une boite remplie des rochers noix de coco réalisés par mon amie Marlène.  Et puis dans son tiroir il y a ma tablette numérique pour voyager en musique, les bouchons d'oreilles pour se couper des bruits de ce gros monstre de bâtiment.  Enfin ma table de nuit c'est ma bibliothèque où se réfugie tout ce que je lis, livres, journal, revues, il y en dessus, dedans, un peu partout. Si je pouvais rentrer dans ma table de nuit, je serai presque chez moi.

Lundi 19 octobre La prise de sang et l'élève infirmière

8h30 une jeune élève infirmière rentre dans la chambre pour faire me faire une prise de sang. Elle veut se montrer confiante. Je la ramène à la réalité : " Vous savez je ne suis pas facile à piquer" et pour lui mettre en situation je lui raconte le stagiaire des urgences qui a réussi du premier coup. Elle le reconnait, Il est dans sa promo.  "On va   se détendre ». Je lui dis que moi je suis détendu. Elle met le garrot au bras gauche. "Effectivement les veines sont profondes, j'essaie sur la main. Attention je pique. Je ne vous fais pas mal ?  Ça ne coule pas je bouge l’aiguille.  Bon je vais piquer ailleurs. Je vais chercher d'autres aiguilles. Je suis désolée, je n’aimerais pas qu'on me fasse ça.... " Elle revient elle refait trois tentatives en changeant de bras. Toujours aucun tube de rempli. J'ai seulement gagné 4 bouts de coton maintenus par des sparadraps sur les deux bras.  Dépitée elle appelle l’infirmière. Je la rassure en lui disant que je n'ai pas eu mal. Et elle s'en est allée vers d'autres malades plus coopératifs.

Lundi 19 octobre Dimanche

Le dimanche matin se caractérise par l'absence. D’abord il n'y a pas de croissants pour le petit déjeuner Dans le service les femmes en blanc sont beaucoup moins nombreuses mais pour autant disponibles. Une aide-soignante me raconte qu'elle travaille ici depuis 1978. Dans 7 mois elle part en retraite et pourtant elle a toute l'énergie pour continuer à bien faire son métier avec humour mais pas trop.  Dans les couloirs peu de patients Les chambres semblent vides. Quand je regarde par la fenêtre je vois les parkings sans voitures, très peu de véhicules sur le périphérique. Mais où sont les gens pas au CHU apparemment.
A 11 heures je suis le premier et le seul client de la maison de la presse. J’ai la chance de rencontrer le nouveau livre de mon ami Higelin rempli de sa folie et de sa joie de vivre. A la cafétéria je m'installe tranquillement pour boire un thé à la menthe en lisant ouest dimanche.  Je remonte pour mon repas. Il peut prendre l'appellation de "repas du dimanche" par la présence d'une petite part d'une tarte au citron.

L'après-midi sonne le réveil du grand bâtiment. Les familles se montrent dans le hall et les ascenseurs.  Les gens viennent les bras chargés ou s'arrêtent à la boutique du hall d'entrée.  Ainsi notre univers s'embellit de bouquets de fleurs de revues ou de jouets pour enfants.  J'ai même vu un grand-père avec un panier pique-nique.  Les malades qui le peuvent sortent de leur chambre assis en fauteuil, appuyés sur des béquilles ou en trainant des poches ou des perfusions, peu importe mais ils sortent. En quittant le lit, la chambre, nous nous redressons, nous quittons quelques instants notre statut de malade. Les plus téméraires et les fumeurs s'offriront une sortie au soleil. Et la journée passe. L'odeur de la soupe chasse nos visiteurs et nous replongeons dans le calme et la régularité de notre vie hospitalière.

Samedi 17 octobre Nuit et musiques

Ce soir allongé dans un lit d'hôpital éclairé par les lumières de la ville, j'écoute du Bach au piano, alors que dans une salle de spectacle à rennes il y a une place inoccupée. La mienne. Ce soir mes oreilles auraient dû être remplies par les notes de guitares dont certaines qui me sont importantes.  Ce soir, les yeux vers le plafond Bach et sa musique me permettent d'aller au-delà de l'instant présent et de ce qui se joue dans mon corps.

Vendredi 16 octobre : Urgences

Vire: la valses des pas et mots inutiles

Je craignais pour le cœur mais je n'avais pas mal. Alors j’ai attendu. Normal. Dans mon box, porte ouverte. J’ai vu passer des gens, beaucoup de gens de blancs vêtus. 80 en une heure pour être précis. 80 dans les deux sens. Les mains pleines les mains vides d'un pas lent ou en trottinant. Mais jamais ne s'arrêtant. Pas un mot pour le patient observateur. Par contre en écoutant j'ai appris beaucoup de choses. Une infirmière est très forte pour tuer les poulets. D’ailleurs ce soir après le boulot elle en tuera 15. Une autre soignante a rentre son salon de jardin. Sa collègue ne l'a pas sorti car elle part toujours en voyage quand elle est vacances.  Avant de pouvoir manger la fameuse crème vanille hospitalière j'ai eu la chance de connaître le menu du futur dîner de la moitié service. Les discussions du personnel ne rencontrent que rarement les mots des patients.


A un moment une envie pressante. On m'indique les toilettes. Elles sont dans l'entrée ou attendent les familles des personnes hospitalisées.  Je me lève. Le seul souci est que je ne suis couvert que la seule jaquette réglementaire qui de par ma taille ne cache pas grand-chose de mon anatomie postérieure.

Caen:  l'art de l'attente

D'abord le plus compliqué est de se débarrasser de sa voiture. L'accueil sympathique est réalisé par une dame qui sait rester positive quel que soit l'angoisse en face d'elle.  Puis le médical arrive. Premier sas, première occasion d'une longue série de raconter son histoire.  Je suis orienté en secteur bleu ce qui m'indiffère en tant que daltonien. Je suis accueilli par une aide-soignante pour un inventaire de mes biens. Telle une entrée en prison il faut laisser ses effets personnels mis dans un sac vestiaire.  L'aide-soignante me fournit ma tenue de bagnard, un beau pyjama xl jetable bleu. Et l'attente commence. Les urgences ici sont mieux organisées. Le personnel semble faire moins de pas inutiles. Dans un grand hall situé entre deux rangées de box les patients attendent. Quand c'est au tour de l'un de nous de bénéficier de soins il est mené dans un box libre. Et c'est ainsi que se met en place un beau ballet de brancards.  Suivant les mouvements de chacun nous changeons régulièrement de voisins.  Parfois, il manque un peu de place et les chariots se frottent. Le camp des soignants est constitué d'une multitude de professionnels. Il y a le jeune élève infirmier deuxième année qui se présente qui déploie politesse, explications et gentillesse. Il n'est pas très à l'aise mais déjà montre compétence à faire une prise de sang. Il y a cette grande étudiante en médecine qui ne semble adresser la parole à personne tout en faisant son travail. Il a ce brancardier qui blague une jeune fille accidentée de la route en lui proposant de racheter l'épave pour de la pièce détachée.  Il y a cet interne de neurochirurgie qui vient par deux fois me voir pour évaluer l'urgence de ma situation et qui en s'excusant repart auprès d'un patient en extrême urgence.  Il y a les internes, déjà, médecins qui s’affirment en effectuant les techniques apprises. Il y a les infirmières qui souvent orchestrent en apportant humanité dans cette organisation.  Et il y a notre chef aide-soignante. Comment la décrire. Par-dessus sa blouse réglementaire, elle porte une grande tunique blanche qui se gonfle quand elle s'agite et elle s'agite beaucoup. Les urgences lui appartiennent. A toute nouvelle arrivée elle se charge de faire l'inventaire des affaires personnelles et de fournir une tenue. Elle surveille ce que font les internes et les reprend si elle estime qu'ils n'ont pas bien rangé le matériel.  Elle donne l'ordre à ses collègues d’arrêter de nettoyer les brancards car elle estime que les brancardiers ne font pas suffisamment leur boulot. Et quand ces derniers arrivent, une fois qu'elle les a remis en place elle les aide à faire le travail.